84, Charing Cross road – Helene Hanff - traduit de l'anglais par Marie-Anne de Kisch
Petit roman épistolaire, petite gourmandise, dont j'ai lu des billets chez Sylire, qui a aimé, ou Hérisson et Bladelor qui sont beaucoup moins enthousiastes .
Helene Hanff, new-yorkaise, est écrivain. Enfin, elle se voudrait bien célèbre dramaturge, mais elle n'arrive pas à faire reconnaître son talent, et vivote dans cette Amérique d'après-guerre grâce à l'écriture de feuilletons pour la télévision et de livres pour enfants.
Son goût pour la culture la mène à vouloir dévorer des livres rares mais ses moyens ne lui permettent pas d'en acquérir.
Quel personnage que cette Helene !
Elle trouve moins fatigant d'écrire à une librairie anglaise de lui expédier tel ou tel livre rare plutôt que de traverser New-York pour trouver le même ! Il faut dire que l'Angleterre exsangue, fin des années 40, se voit contrainte à vendre ses richesses à des prix dérisoires.
C'est ainsi que Franck Doel de la librairie Marks & Co., au 84, Charing Cross Road à Londres, sillonne l'Angleterre d'après-guerre et visite les vieilles demeures pour acheter à des propriétaires ruinés leurs bibliothèques et leurs ouvrages rares.
Pendant 20 ans, de 1949 à 1969, Helene et Franck vont correspondre, comme le feraient une cliente et un commerçant. Puis les relations vont évoluer, et si Franck reste très en retenue pendant longtemps (on est britannique ou on ne l'est pas !), Helene se lâche très rapidement.
Elle a un humour bien particulier et son fichu caractère ressort assez souvent quand elle n'obtient pas ce qu'elle veut aussi rapidement qu'elle le voudrait.
Les liens se font amicaux aussi avec l'ensemble du personnel de la librairie auquel Helene envoie des suppléments de nourriture. Elle a beau ne pas rouler sur l'or, comparé à ce que vivaient les Anglais à cette époque, elle pouvait se permettre de les régaler d'œufs en poudre ou de jambon.
L'intérêt de ce petit roman, au-delà de la relation humaine qui se fait entre deux personnes qui n'auraient jamais dû se rencontrer ni par lettres interposées ni dans la vraie vie, c'est l'amour de la littérature, et pour moi, la découverte de nombre d'auteurs ou d'ouvrages que j'ignorais totalement.
Helene n'aime pas les romans. Ce qu'elle aime, ce sont les biographies, les ouvrages techniques, et quand elle découvre un ouvrage qu'elle aime et qui fait référence à de nombreux auteurs, elle veut absolument lire tous les auteurs référencés dans l'ouvrage.
Elle est maniaque, impulsive, désordonnée, sans grande éducation. D'ailleurs ses lettres sont bourrées de fautes de graphie, les majuscules et les points d'exclamation se bousculent... elle a dû choquer plus d'une fois ce pauvre Franck, qui a fini par apprécier cette amoureuse des livres et s'est finalement amusé de ses sautes d'humeur.
Dans ce trop court livre, j'ai beaucoup souri, j'ai aussi été très émue par ces rendez-vous manqués entre ces deux personnes si différentes
Si je n'avais pas su dès le départ que ces lettres étaient réelles, j'aurais pu penser qu'un auteur de talent avait eu une idée de génie pour créer ces deux personnages.
Une citation pour vous montrer qu'Helen n'était pas du genre à s'embarrasser de formules de politesse !
"Avec le printemps qui arrive, j'exige un livre de poèmes d'amour. Pas Keats ou Shelley, envoyez-moi des poètes qui peuvent parler d'amour sans pleurnicher. Wyatt ou Jonson ou autre, trouvez vous-même. Mais si possible un joli livre, assez petit pour que je le glisse dans la poche de mon pantalon pour l'emporter à Central Park. Allez, restez pas là assis ! Cherchez-le ! Bon sang, on se demande comment cette boutique existe encore."
Grâce au billet de Sylire, j'ai découvert le site dédié à cette librairie qui n'existe plus maintenant à Londres. Dommage, j'aurais adoré y faire un tour.
Il y a eu également en 1986 un film de David Hugh Jones avec Ann Bancroft et Anthony Hopkins. A voir peut-être.
C'est le mois anglais qui continue