Littérature, cinéma, voyages...
Du Domaine des Murmures
Carole Martinez
Les lycéens ont attribué cette année leur Goncourt à ce roman.
Cette nouvelle a illuminé ce triste lundi gris de novembre et m'a stimulée pour enfin écrire ce petit billet qui attendait parmi tant d'autres que je me penche sur son cas.
Ce roman a largement été chroniqué par de nombreuses blogueuses, je ferai donc court.
Esclarmonde est une voix d’outre-tombe. Elle vient raconter sa vie de jeune fille du Moyen-âge, jeune fille qui a osé dire non à son père et à une société qui soumet les femmes aux ordres des hommes. Elle a refusé l’homme que son père lui a choisi et le jour des noces a préféré se mutiler devant l’autel plutôt que d’être prisonnière du mariage. Quelle modernité !
Elle a préféré s’emmurer, et consacrer sa vie à la prière et à Dieu. Son père a fait construire une minuscule cellule attenante à la chapelle du domaine et renié sa fille pour son acte de rébellion. Mais est-ce seulement pour cela ?
Dans sa minuscule cellule Esclamonde va passer de l’extase au doute, mais sa foi ne faillira pas. Loin d’être isolée du monde, son histoire extraordinaire (que je ne révèlerai pas ici, lisez ce roman !) va la faire devenir une sainte pour ceux du domaine des Murmures et bien au-delà. Pas besoin pour elle de sortir pour voir le monde, c’est le monde qui vient à elle, en longues files de croyants cherchant conseil et bénédiction.
Après quelques mois de cette vie tournée vers Dieu et vers les autres, son corps la forcera à prendre à nouveau conscience d'elle-même.
Son père ne supportera pas ce qui arrive à sa fille et fuira vers Saint-Jean d’Acre en se joignant aux croisés.
Je me suis laissé prendre par cette histoire extraordinaire, par la langue de Carole Martinez, par ses mots qui font passer de la réalité sinistre d’une époque rude au bonheur de l’extase mystique. Cette langue, si poétique, décrit avec le même talent la barbarie et la béatitude. C’est de la broderie fine que ce texte-là.
Les personnages sont forts et il est difficile de s’en défaire. Que ce soit le père aimant qui deviendra bourreau, ou Esclamonde qui continuera envers et contre tout de servir Dieu avec ferveur sans pour autant s’aveugler sur la religion.
Un conte, comme un murmure, qui nous entraîne du côté du merveilleux.
A lire absolument.
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