Le Petit Chaperon rouge – Texte et mise en scène Joël Pommerat (à partir de 6 ans)
Texte publié aux éditions Actes Sud-papier collection Heyoka Jeunesse
Avec Rodolphe Martin– Isabelle Rivoal – Valérie Vinci
On connaît tous l’histoire du Petit Chaperon rouge, on a tous eu peur à l’approche du loup. On a tous tremblé pour la grand-mère et rit au dialogue entre le loup/grand-mère et le Petit Chaperon rouge « comme vous avez de grandes dents ! ».
Et bien , tout pareil !!!
Joël Pommerat s’est emparé de cette histoire venue de la tradition orale et l’a adapté pour donner à entendre et à voir un petit bijou de 45 mn. Un vrai moment de grâce !
Comme dans le conte, il y a le Petit Chaperon rouge, la mère, la grand-mère (que des femmes !) et le loup. Et comme il s'agit d'un conte, il y a un narrateur.
Un narrateur à l'avant-scène, qui nous présente l'histoire, introduit les scènes, bien raide dans son beau costume, et le commentaire parfois ironique, souvent très pince-sans-rire.
Le Petit Chaperon rouge veut absolument sortir mais sa mère, très occupée, si occupée qu'elle a bien peu de temps pour son enfant, ne veut pas qu'elle sorte. Dehors, il y a du danger, de l'inconnu, la forêt en est pleine. Devant l'insistance de l'enfant, elle lui promet de la laisser aller voir sa grand-mère, vous connaissez la suite.
Dans les premières minutes, pas de dialogues, seul le narrateur a la parole. Ensuite les dialogues sont justes magnifiques, ils engendre rire, sourire, émotion, peur.
Joël Pommerat fait de ce conte un vrai régal pour les yeux et les oreilles.
Pas de décors inutiles, il plante une apparente simplicité. La lumière et le son véhiculent les émotions autant que les dialogues. Beaucoup de scènes sont dans une quasi obscurité, seuls les personnages sont éclairés. La forêt dangereuse existe grâce à un jeu de lumière sur le plateau, pas besoin de plus.
La chorégraphie de certaines scènes est un vrai régal. La mère, pieds nus sur demi-pointes, se déplaçant de long en large sur le plateau, au rythme du bruit de talons aiguilles sur du parquet. Pas la peine d'en dire ou d'en montrer plus pour dire la mère pressée, affairée, lointaine.
La mise en garde de la mère sur les dangers de la forêt est brillante lorsqu'elle mime le loup pour effrayer sa fille. Cela commence comme un jeu, comme le "aller, raconte moi encore, fais moi peur !". Elle cède, comme une mère qui raconte pour la ènième fois le passage préféré d'un enfant. Elle se penche, toujours sur demi-pointes, s'approche de plus en plus vite, et de légère elle devient terrifiante, secouant sa longue chevelure rousse, accompagnée d'un rugissement à vous clouer sur votre fauteuil. Aucun mot n'a été prononcé, juste ces gestes et ce rugissement. J'ai presque eu aussi peur que le petit garçon assis à côté de moi et qui n'en menait vraiment pas large !
Et que dire du loup, justement ! Il joue avec la petite fille, et on a peur pour elle. Mais une fois qu'il a mangé la grand-mère et qu'il essaie d'attirer le petit chaperon rouge qui résiste, son attitude est un pur bonheur d'humour ! On croirait presque l'entendre soupirer et lever les yeux au ciel tant il n'en peut plus d'attendre !
Pommerat n'illustre pas le conte, il le réinvente, tout en étant très fidèle à sa trame.
Psttt ! vous avez remarqué ? Le Petit Chaperon rouge...il n'est pas rouge !
Ils ont bien de la chance les enfants qui découvrent le théâtre avec Joël Pommerat.
4/8 pour le challenge en scène de Bladelor